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17 décembre 2011

Sensuelle séduction 2

Photo: Douglas Mandry avec Dmitry Bukreev et Jonas Meier

Les premiers flocons commencent à tomber, Think Tank vous sort un nouvel épisode de Sensuelle Séduction, histoire  de passer les fêtes au chaud. Une nouvelle sélection de tubes plein de sueur, avec des voix féminines langoureuses et des synthés en forme d'appels au plaisir. L'Angleterre sort son sex-appeal avec Charli XCX et Jessica 6. Les Etas-Unis ne sont pas en reste avec Class Actress, et Italians Do It Better nous projettent dans un début 2012 tout aussi sexy.


Il fait peut-être foid dehors mais ce n'est qu'une raison supplémentaire de se réchauffer à l'intérieur, en plus les décorations de Noël appellent à des disco pleines d'amour et de tendresse. Finies les tensions  de l'année, on se détend et on retrouve le plaisir de se laisser aller à nos penchants les plus romantiques. Tu débarques dans une soirée toute de lumières et de scintillements. C'est bientôt – ou déjà – les vacances. Il n'y a plus qu'à s'aimer. Et ne penser plus qu'à ça. Class Actress te propose justement de vivre les passions comme dans les films les plus guimauves. Dans ce groupe, tu entends d'abord une voix sensuelle au possible et qui semble familière. Et tu ne te trompes pas, car la chanteuse fait partie de Chairlift, qui s'apprête à sortir un nouvel album l'année prochaine. Leur premier disque, DOES YOU INSPIRE YOU, était sorti en plein boom brooklyn post-MGMT et est assez vite tombé dans l'oubli : cela est en partie lié à un son un peu plat, malgré  une voix et des mélodies pop à en mourir comme sur "Planet Health", "Bruises" et surtout "Evident Ustensil". Avec Class Actress, le côté rêverie de salon est laissé de côté pour pencher franchement dans la direction flirt. L'album porte d'ailleurs le nom de RAPPROCHER, avec ce français si évidemment romantique pour tout Américain qui se respecte. Et le son de cet album donne bel et bien envie de se coller les uns aux autres. Synthés et basses travaillent de concert pour produire des titres sexy en diable, une disco parfaite pour emballer. Surtout, la voix est à nouveau un des gros arguments séduction: elle ne susurre pas, elle ne chante pas, elle ne crie pas, elle ne souffle pas, elle fait tout ça à la fois, jouant des différents registres pour construire une trame hyper sensuelle faite d'un va-et-vient incessant entre jouissance et recueillement, entre hédonisme et mélancolie. Sans s'attarder sur plusieurs bons titres, tu peux direct t'extasier sur LE tube de RAPPROCHER: "Love me like you used to". Toute la magie de la disco se trouve concentrée dans ce titre: un début en forme de plainte amoureuse, un cri de déchirement pour refrain, des ralentissements plein de séduction, une montée proche de l'orgasme suivie d'un arrêt où le parlé prend la forme d'une victoire de la sincérité.


Après une telle chanson, normal que tu sois tout-e excité-e. Ton regard parcourt la salle et la vérité c'est que tu as presque envie de faire l'amour à tout le monde. Bon, ce serait sûrement un peu trop brutal de lancer direct du The Weeknd, alors autant rester dans la veine disco avec Jessica 6. A nouveau, un groupe qui ne sort pas du néant, vu que le trio officiait à la base dans les tournées de Hercule and Love Affair. Justement, on retrouve chez eux ce qui avait fait la qualité d'un titre comme "Blind" avant que de trop nombreuses écoutes l'aient rendu indigeste. Une disco encore plus assumée que celle de Class Actress, ce qui permet aussi une palette de sons plus large, utilisant des couleurs plus bizarres. Dès le début de l'album, on s'éloigne des lignes trop évidentes. Il y a bien un rythme qui est là pour te faire adhérer direct, mais à côté, il y a des bruissements, des synthés qui ne rappellent pas tellement Cut Copy et beaucoup plus Guyers' Connection. Et comme dans toute bonne disco, la voix est érotique au possible. Surtout, la chanteuse de Jessica 6 rappelle d'où vient ce genre musical, justement d'un trouble dans le genre, homo, trans et dragqueen. Avec cette voix très basse, Jessica 6 s'assure d'éviter toute comparaison avec la pop mainstream conventionnelle pour donner une séduction bien plus charnelle et transgressive. Avec différents éléments, sonorités nu-disco variées et dansantes, voix trans, SEE THE LIGHT avait tout pour être un bon album sensuel. Le manque de variation aurait même été excusé. Malheureusement, Jessica 6 ne tiennent pas le rythme et passé quelques chansons ça devient carrément mou du genou, voir d'autre part. Dommage car les trois premiers titres  avaient provoqué la sécrétion de diverses substances. Des mélodies pleines de sensualité et des refrains où se lâcher définitivement. Sur "White Horse", tu pleures: laisse-moi te voir danser. Sur "See the light", ça y est, tu sues. Et sur "Prisoner of Love", c'est tout ton corps qui devient liquide. La preuve dans un clip qui illustre parfaitement le propos de ce paragraphe.


C'est sûr mainteant l'ambiance est posée, plus moyen de faire machine arrière, tu t'es bien rapproché, tu as fait le coup des yeux grands ouverts et cela a marché. Tu sais ce qu'il te reste à faire. Tout déchirer à grand coup de fulgurance romantique, faire se tressaillir les corps en plein électro-choc émotionel. Pour cela, plus le temps de parcourir tout un album, il faut dégainer des tubes qui n'hésitent pas à lancer des I Love You aussitôt, des tubes coup de foudre. La bande originale de DRIVE a refait parler du label Italians Do It Better. Même le récent hommage au film allait chercher un titre d'un groupe y appartenant, malgré son absence sur la bande originale. Il s'agit de "Digital Versicolor" de Glass Candy. Un nouvel album du groupe est prévu pour le début de l'année prochaine, seuls deux titres ont déjà fait leur apparition. Beaucoup moins coldwave que l'ambiance de Drive, "Warm In The Winter" et "Halloween" plongent la tête la première dans l'héritage italo-disco pour en ressortir une musique en même temps extrêmement pop et dans l'air du temps, et rendue bizarre par un côté tout sauf simulé. Si "Halloween" se fait bizarre en alignant des cliquetis, "Warm In The Winter" arrache les derniers boutons et n'hésite pas à aller le plus loin possible dans le cri d'amour épique, fait de montées permanentes. Toujours chez Italians Do It Better, est attendu, pour 2012, le nouvel album des Chromatics, succédant au génial NIGHT DRIVE. Si les références sont les mêmes, avec "Kill For Love", l'hédonisme s'est transformé en mélancolie. Il n'est plus question de choper mais de déclarer sa flamme. Tous les instruments ont les yeux qui coulent, une de ces chansons qui foudroient le coeur sans prévenir. Bon, les sentiments se sont un peu éloignés de la sensualité, pour ne pas conclure sans refaire partir le chauffage, on termine donc avec "Nuclear Season" de Chali XCX, un tube, cela ne fait aucun doute, mais chaud, chaud, chaud, bien que se basant sur une récupération d'influences witch house et de gothwave. Une des meilleures choses que nous ait donnée la pop cette année, on vous laisse avec le clip, avec chiens et triangles, dont l'esthétique est elle aussi le signe que la pop a décidé de se venger de la witch house, une vengeance qui nous plaît beaucoup.