Illustration : Giom |
Retour aux affaires pour Tim
Burton ! Alors que le réalisateur américain virait franchement tête
baissée dans le plus que moyen, à 53 ans, il décide de s’attaquer aux vampires
(comme tant d’autres) pour revigorer un peu son style et affirmer sa place de
cinéaste unique, populaire mais talentueux.
Tim Burton entre tranquillement
dans sa quatrième décennie de réalisation de long-métrages, et en jetant un
coup d’œil sur sa filmo, on ne peut s’empêcher de remarquer que ce type nous a
marqué, au moins une fois, dans notre enfance (Batman), adolescence (Sleepy Hollow) ou même à l’âge adulte (Big Fish). Le premier Burton que j’ai vu fût Batman (1989) et son Gotham City allait devenir mythique, enfumé et aussi noir que le masque de la chauve-souris humaine. Le noir était devenu ma couleur
préférée, Batman mon idole et je faisais la connaissance de Jack Nicholson.
Trois éléments décisifs pour un gosse qui allait ensuite, avec ses potes,
découvrir le formidable Edward aux mains d’argent sorti l'année suivante. Peut-être son meilleur film, qu’il ne
dépassera sans doute jamais film (à noter que c’est le dernier dont il fut
lui-même le scénariste). Tim Burton rencontre Johnny Deep. C'est le coup de foudre, le début
d’une grande histoire d’amour. Et depuis, les deux acolytes ont enchaînés sept
bobines ensemble sur les quinze possibles. Le duo se retrouvera 22 ans plus
tard (mais que le temps passe vite), dans un film qui parle un peu de jeunesse
éternelle, beaucoup de sorcellerie et bien sûr d’amour.
Pourquoi Dark Shadows est-il le meilleur Burton depuis Big
Fish ?
Pour plusieurs raisons. Parce qu’entre deux, des merdes, il y en a eues. La Planète des singes a mal vieilli, mais n’était déjà pas une réussite à sa sortie. Puis Burton a enchaîné le moyen (Les Noces Funèbres, Sweeney Todd) avec l’horrible (Charlie et la Chocolaterie) et même l’immonde : Alice au pays des merveilles. Comparaison esthétique facile me direz-vous ? Plus que ça. Dans Dark Shadows, Burton réussit à reprendre tout ce qu’il savait faire et à laisser tomber (presque) tous ses penchants gothico pénibles et chansonnettes dégoulinantes. Dans Dark Shadows, Burton se remet en question : il se moque de lui-même et emmène le spectateur dans une histoire drôle et heureuse réussissant même l’impensable : nous refaire aimer Johnny Deep tombé raide mort dans ses pénibles affaires de pirates perdus aux Caraïbes. Adaptation d’une série TV des années 70, Tim Burton raconte qu’il trouvait jouissif, quand il rentrait des cours, de regarder une série qui se passait la nuit alors qu’il était 15h. C’est ce paradoxe alléchant qui marche dans son œuvre : faire de la nuit la base de ses récits, immerger son spectateur dans l’obscurité, base de l’art cinématographique.
Pour plusieurs raisons. Parce qu’entre deux, des merdes, il y en a eues. La Planète des singes a mal vieilli, mais n’était déjà pas une réussite à sa sortie. Puis Burton a enchaîné le moyen (Les Noces Funèbres, Sweeney Todd) avec l’horrible (Charlie et la Chocolaterie) et même l’immonde : Alice au pays des merveilles. Comparaison esthétique facile me direz-vous ? Plus que ça. Dans Dark Shadows, Burton réussit à reprendre tout ce qu’il savait faire et à laisser tomber (presque) tous ses penchants gothico pénibles et chansonnettes dégoulinantes. Dans Dark Shadows, Burton se remet en question : il se moque de lui-même et emmène le spectateur dans une histoire drôle et heureuse réussissant même l’impensable : nous refaire aimer Johnny Deep tombé raide mort dans ses pénibles affaires de pirates perdus aux Caraïbes. Adaptation d’une série TV des années 70, Tim Burton raconte qu’il trouvait jouissif, quand il rentrait des cours, de regarder une série qui se passait la nuit alors qu’il était 15h. C’est ce paradoxe alléchant qui marche dans son œuvre : faire de la nuit la base de ses récits, immerger son spectateur dans l’obscurité, base de l’art cinématographique.
Nous retrouvons donc une histoire de morts, une famille Adam's pas chiante, un
amour impossible, des personnages drôles et attachants, une bande-son jouissive
(merci Tim de nous rappeler qu’Alice Cooper n’est pas mort) et des gags qui
fonctionnent. Loin du chef-d’œuvre, mais un détour réussi au film d'horreur de seconde zone, usant des codes du film de vampires en les mélangeant à ceux de la comédie, un clin d’œil à
Mel Brooks qui réussit à faire oublier les défauts du film : une scène finale
un peu too much surplombé d'un scénario trop négligé. Mais l’essentiel est là et Burton s'amuse en signant des séquences cultes, comme
la scène d’amour qui va dans tous les sens ou celle de la séance de psychanalyse du vampire. Passé le prologue, le générique nous montre l'arrivée d'une jeune fille au manoir de Collinwood sur Night in White Satin des Moody Blues. Une immersion en deux temps, discrète et juste classe. Evidemment, cette euphorie passagère
est trompeuse puisque retrouver du bon Burton n’est pas chose courante, mais
quand ça arrive, ne l’évitons pas et acceptons-le. Le cinéaste nous rassure en prouvant que les histoires de vampires peuvent encore produire de beaux récits et que le monstre le plus vieux du cinéma aura su grandir avec l'art qui l'aura rendu célèbre, avec ses hauts (Dracula de Browing, Nosferatu the Vampyre, Thirst) et ses bas (Twilight, Twixt). Le parallèle vient tout seul – ce
film prouve que nous retrouverons du bon Burton au moins une fois par décennie.
Peut-être plus, lorsqu’il sait rire de lui-même.
Dark Shadows de Tim Burton (Etats-Unis, 2012)
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