MUSIQUE      CINEMA      ARTS VISUELS      LIVRES      POP LUCIDE      POST DIGITAL

22 juin 2011

TANKINO : Nostalgia de la Luz, Patricio Guzmàn

Image hébergée par servimg.com
Illustration: Giom







































Dans Nostalgia de la Luz, le réalisateur chilien nous emmène dans un film  documentaire qui met en rapport des sujets qui à première vue ne collent pas vraiment ensemble: des fouilles archéologiques, la famille, les camps de concentration et l’Univers. En s’appuyant sur les recherches des astronomes du désert d’Atacama, Patricio Guzmàn nous explique les moments pénibles qu’a traversés son pays.

On pourrait reprocher à Patricio Guzmàn d’être plus un historien qu’un cinéaste. Après avoir produit et réalisé la trilogie documentaire La bataille du Chili qui le rendit célèbre, il reste extrêmement proche de son pays natal en réalisant plusieurs documentaires. Très touché également par les problèmes politiques de son pays, Guzmàn, même quand il parle des étoiles, ne peut s’empêcher d’évoquer l’histoire. Son dernier film prend place dans le somptueux désert d’Atacama qui est l’endroit le plus sec de la Terre – il paraît qu’il n’y pleut que trois ou quatre fois par siècle. Cette extraordinaire absence d’humidité permet aux astronomes du monde entier de voir un ciel d’une transparence unique et d’observer les étoiles dans des circonstances optimales. Après nous avoir expliqué ce fait unique, la familière voix de Guzmàn va nous parler de la terre sur laquelle les magnifiques télescopes blancs sont construits. Ces énormes loupes dirigées vers le ciel reposent en fait sur une terre contenant un souvenir. Un souvenir qui explique la présence de plusieurs femmes veuves venues retourner cette terre rouge. C’est le souvenir du passé, de leurs maris ou d’une personne de leur famille qui a été enterré dans ce désert par Pinochet. Les ossements des prisonniers politiques reposent, éparpillés, en morceaux, au pied des télescopes et des étoiles. Mêlant des séquences d’entretiens avec des scientifiques et de ces femmes-chercheuses avec des images du cosmos et des montagnes arides, on comprend, petit à petit, le but du réalisateur.


Et son idée est une réussite. Le film tient la route grâce à une voix-over qui raconte l’histoire du Chili du XIXe siècle (permettant de comprendre celle du XXe) de façon extrêmement posée et sans jamais vouloir conquérir à tout prix l’âme du spectateur. Guzmàn ne fait que raconter, simplement et limpidement, l’histoire de ses ancêtres et le passé qui nous suit indéfiniment mais qu’il est si difficile parfois de comprendre. Un des astronomes nous explique ce paradoxe : le présent n’existe pas. Ou alors, il est très difficile à percevoir. Tout ce que nous voyons appartient au passé. Le temps de lire ces lignes, elles sont déjà inscrites dans le passé, certes proche, mais à un passé quand même. Les quelques séquences « musicales » (ou de contemplation) que le film comporte obligent la comparaison avec le The Tree Of Life de Terrence Malick qui contient de longues minutes de ce type de scènes. D’ailleurs, le fond de Nostalgia de la Luz n’est pas si loin de celui de la Palme d’Or 2011: on y parle du passé et d’un drame, le tout entrecoupé d’images du cosmos. Le parti pris de Guzmàn est bien plus modeste. Et si l’on ose la comparaison, ce n’est pas pour rabaisser le film chilien. Car au contraire, par instants, il ferait presque ressortir les défauts du film de Malick. Bref, vous l’aurez compris: foncez !