Photos: Frédéric Gabioud |
Plutôt que de vous servir un énième top 5, 10 ou 100 des albums ou des films de l'année 2011, Think Tank a décidé de chambouler les habitudes de fin d'année et de prendre un peu plus de temps pour permettre un meilleur regard sur l'année écoulée. A l'instar de ce que nous faisons tout au long de l'année, nous avons décidé de brouiller les frontières et de mélanger les différents domaines dans un classement de 10 meilleurs moments culturels pour chacun des chroniqueurs. Pour mieux vous donner une idée des richesses, des déceptions, des explorations, des revirements et des beautés que cette année a vu éclore. Avec ce souci constant pour l'équipe de Think Tank: être en permanence à l'affut de multiples voies que le monde culturel contemporain peut emprunter.
Pierre Raboud, rubrique musicale de Think Tank
1) Le soulèvement des peuples.
Que ce soit en Égypte, en Tunisie, en Syrie, ou dans la formation des différents mouvements des Indigné-e-s à travers le monde, les mouvements sociaux sont revenus sur le devant de la scène en cette année 2011, renversant des tyrans et remettant en cause un système capitaliste dont l'injustice est de plus en plus criante. Bien qu'il ne s'agisse pas de produits culturels, pour moi, un bilan de cette année ne peut faire l'impasse sur un phénomène qui aura peut-être un impact déterminant sur la culture mondiale et surtout dont l'importance et la beauté ont dépassé toutes mes attentes pour 2011. En passant, mentionnons que Kanye West s'est pointé à Occupy Wall Street et que Jay Z en a commercialisé des T-shirts. Lol
2) Le label Tri Angle.
Au centre de la rubrique Musique Hantée, Tri Angle a fait la loi toute cette année, en étant la pointe d'un son ultra contemporain fait d'hyperdub et de downtempo. A leur tableau de chasse, un des meilleurs albums de l'année, WITH U de Holy Other, et le transfert du R'N'B bizarre de How To Dress Well. Surtout, on trouve dans la véritable Dream Team du label les deux héros musicaux de cette année. A ma gauche, Balam Acab ne s'est pas contenté de sortir un album magnifique de finesse aquatique, WANDER/WONDER, mais a aussi signé des remixes au top du love, ne laissant passer aucun titre digne d'intérêt, que ce soit Lana Del Rey, Charli XCX ou Sleep Over. A ma droite, le producteur de l'année: Clams Casino. Sur Tri Angle, il sort un album foisonnant d'idées mais surtout tout au long de 2011 il a pondu des tracks hip hop monstrueuses, que ce soit pour Lil B, Soulja Boy et surtout ASAP Rocky. Tellement bonnes qu'elles restent surpuissantes en version instrumentale.
3) Le hip hop au top du top.
Les années 2000, associées au renouveau du rock, sont bien mortes. Les Strokes, Kills et autres anciens d'Oasis ne sont plus capables que de décevoir. Les héros du rock indé américains se sont enfermés dans la routine, Atlas Sound a délaissé l'exploration pour une forme renouvellée de crooner. Heureusement, le hip hop a relevé la tête et le niveau général. Alors qu'on le pensait seulement bon à sortir de grands albums pop, l'année 2011 l'aura vu enchaîner bombes et chefs-d'oeuvre. ASAP Rocky a déjà été mentionné. Il faut bien sûr y ajouter le meilleur album de l'année, BLACK UP de Shabazz Palaces, ainsi que toute la clique de ODD FUTURE. Du côté français, alors que cela fait bien longtemps que je ne me suis pas extasié sur quoi que ce soit provenant de ce pays, 1995 est venu balancer un ouragan de fraîcheur et LA SOURCE s'est placé tout en haut des titres les plus écoutés cette année.
4) Drive de Nicolas Winding Refn.
Glacial, brut, porté par un Ryan Gosling aussi halluciné qu'hallucinant, le film coldwave utlime, entre violence et poésie. Le seul film que j'ai vu deux fois au cinéma. Avec à chaque fois la même admiration.
5) Le Kilbi Festival.
L'âge empirant les choses, j'ai de moins en moins de plaisir dans un festival. Mais au milieu des daubes consensuelles et froides, reste le Kilbi. Malgré un espace plus grand et des billets qui partent en quelques heures, l'ambiance et la qualité de la programmation restent au dessus de tout ce qui se fait ailleurs. Trois jours idylliques où on a vécu la vie de hyppies, pleins d'amours et de tendresses canines. Surtout, entre Animal Collective, Darkstar, Buvette, Caribou, nos oreilles ont fait le plein de bonnes musique pour tout l'été.
6) Black Swan de Darren Aranafosky.
Sorti en Europe au début de l'année, son souvenir se trouble un peu. Mais reste l'impression d'une grosse claque esthétique et dramatique.
7) Philippe Parreno à la Serpentine Gallery.
Malheureusement, je n'ai vu que peu d'expositions marquantes cette année. Rien n'a égalé la poésie de l'expo de Parreno en plein milieu de Hyde Park. Une promenade toute en émerveillement, que ce soit en admirant la neige factice tomber de l'autre côté de la fenêtre ou des vidéos mêlant boeufs, ampoules et apparitions.
8) Sonar.
Enfin j'y suis allé. Et les attentes se sont trouvées amplement comblées. Au milieu des drogues et des caïpirinha, des gens qui dansent sans cesse, et des concerts totalement fous, que ce soit Nicolas Jaar, transformant son excellent SPACE IS ONLY NOISE, en performance live monstrueusement house, ou Eskmo et des Djs russes (Mujuice et DZA) très très forts.
9) The Tree of Life de Terrence Malick.
Un film qui a tout pour agacer et qui se frotte sans cesse aux frontières du mauvais gouts. Que ce soit la fin dégueulasse dans le désert, le regard d'un dinosaure, ou les images de nature. Pourtant ça marche. Brad Pitt est époustouflant, le film boulverse toute linéarité et logique pour plonger dans les arcanes de l'humanité. Ne restent plus que la religion, la relation d'un fils à son père, à sa mère, à la mort. Un film qui éblouit rien que par son ambition artistique démesurée. Signe, avec les deux autres films déjà cité dans ce top, que Hollywood se concentre à nouveau sur l'expérimentation esthétique et s'en donne les moyens.
10) Le clip de Vanessa de Grimes.
Une année, c'est aussi cela. Voir quelque chose une fois, passer totalement à côté, l'oublier, puis retomber dessus et rester scotché. La réalisation de ce clip s'impose dans une année peu riche dans le domaine. Ses qualités n'apparaissent pas au premier coup d'oeil. Sous des allures de clip innocent de filles, un jeu parfaitement maitrisé autour de l'esthétique K-pop. A l'instar de la musique de Grimes, la simplicité de la pop se retrouve détournée via la désynchronisation son/image et le floutage du premier plan.
Maxime Morisod, rubrique cinéma de Think Tank
1) Drive de Nicolas Winding Refn en avant-première à Locarno fût mon "good time ciné" le plus marquant depuis belle lurette. Peut-être avais-je été simplement surpris ou ébloui de cette maîtrise si cohérente et intelligente de la mise en scène puisque le film était projeté juste après Cowboys vs Aliens ? Après l'avoir revu quelques mois plus tard, j'ai pu confirmer mon premier avis.
2) Terrence Malick qui reçoit la Palme d'Or pour The Tree Of Life m'a ému pour deux raisons : la première, c'est qu'il n'était pas là. Eternel absent des rendez-vous à paillettes, l'homme qui avait déjà reçu une distinctions pour son deuxième long-métrage en 1978 pour Days of Heaven à Cannes a finalement touché le Graal. La seconde, c'est que The Tree Of Life n'est pas le film parfait ; mais il est une signature en or gravée au bas de l'oeuvre de cet artiste hors norme.
3) "The Death Of You And Me" est le single qui a annoncé en juillet 2011 le premier album solo de Noel Gallagher qui sortait en octobre. A la première écoute, aux premiers accords du refrain, c'est tout un passé qui resurgit, celui de l'un des meilleurs songwriters des années 90. C'est toute la classe du mec qui a écrit Wonderwall et Live Forever qui revit, qui prend une forme iconoclaste d'un passé à l'odeur d'un western leonien. Noel n'avait pas écrit une aussi bonne chanson depuis The Importance Of Being Idle en 2005.
4) L'ouverture de Melancholia, le film géant de Lars Von Trier est un film à lui seul, une sorte de court-métrage réflexif, novateur, spectacle du chaos et de pessimisme. Invoquant Brügel et le grand romantisme germanique, Lars Von Trier signe l'un des prologues les plus puissants de ces vingt dernières années au cinéma.
5) La chanson "Share The Red" de Stephen Malkmus, tirée de son dernier album "Mirror Traffic", est un bijou parmi tant d'autres et rend compte en 2011 qu'il est toujours possible d'écrire de magnifques chansons avec une intro à la guitare électrique.
6) Le retourné de Wayne Rooney contre Manchester City le 12 février 2011 m'a fait levé de mon fauteuil et j'ai eu le réflexe bizarre d'appeler mes parents pour qu'ils viennent voir ça. Quand Rooney claque cette merveille à un mètre et demi du sol et cela contre l'ennemi juré qui commençait alors à prendre du poids avec ces petro-dollars, il remet tout le monde à sa place dont ces nombreux détracteurs qui le disaient fini après avoir annoncé son désir de quitter le club. Ce jour là, Rooney était le King : c'était un artiste. Et Manchester était de couleur rouge sang.
7) "Night Fall" de Kavinsky en doit certes énormément à Refn de l'avoir pris pour son générique d'ouverture de Drive. Mais le début du film avait aussi besoin d'une telle chanson pour déployer sa classe le plus rapidement possible. Le titre passe dorénavant un peu partout et on s'en lasse déjà. Mais quelle claque, la première fois.
8) Deerhoof au Romandie, le concert le plus brillant vu depuis de longues dates. Paradoxal, le groupe tiraillé entre la précision folle du batteur et les envolées expérimentales du gratteux m'a foutu un sacré coup de poing.
9) Le trailer de The Hobbit annonce magnifiquement l'un des films événements de 2012 ; un trailer en trois parties, couronné d'un chant a-capella repris par treize nains. On salive d'avance.
10) Gregory Blackstock au Musée de l'Art Brut (Lausanne) est une expo marquante (comme toujours à l'Art Brut) avec en prime un petit documentaire vidéo qui tourne en boucle où l'on voit Blackstock en pleine création, enfermé dans son atelier de Seattle.
Colin Pahlisch, correspondant artistique et littéraire de Think Tank
1) Le retour prouvé par la mise en scène successive en suisse romande de deux pièces, du grand Harold Pinter, respectivement ses deux premiers succès, Le Gardien (Kléber-Méleau) et La Chambre (chef d’œuvre de concision absolu, c’était à Aigle et ils se sont pas si mal débrouillés). Passablement absent des scènes européennes en général (après recherche, si si) la remise au goût du jour de cet ami de Beckett (sans en être pour autant le copiste) présage le meilleur pour l’année à venir.
2) La consécration pour le romancier américain Jonathan Franzen, qui sort Freedom deuxième volet désenchanté sur la société américaine par le prisme d’une petite famille du Midwest. Style précis et tortueux, analyse prestidigitatrice de la psyché du quidam lambda (peurs, rêves et désillusion), Franzen offre après Les Corrections, un exemple labyrinthique de maîtrise romanesque digne de Steinbeck.
3) L’exemple des Marches du pouvoir de Clooney. Un voyage dans le ventre du Léviathan des magouilles politiques attenantes à une élection américaine. C’est simple, efficace et certains choix de mise en scènes confinent au grand art (cf : l’éjection / vengeance du patron de campagne (Philip Seymour Hoffman), filmé de l’extérieur d’une voiture et dont la tension dramatique est seule présentée par un léger resserrement de cadre). Implacable et prophétique. Ryan Gosling aussi, convainc.
4) La découverte d'un tout petit film chinois, entrevu au festival des Diablerets (VD), Martial Monk raconte la vie d’un moine shaolin dans le monastère d’une province lointaine. Confronté à un choix cornélien (l’argent ou la tranquillité) il part demander conseil à son père qu’il n’a pas revu depuis dix ans. Flirtant entre le documentaire et la fiction sans jamais se décider, Martial Monk suit l’odyssée poignante et rêche d’un maître des arts martiaux. Humble et sublime comme un mouvement de thaï chi.
5) L’hommage par une exposition rétrospective à l’œuvre de Roman Opalka (Thonon-les-Bains). Dessins, eaux-fortes et peinture. Un mirage d’absolu, dernière manifestation de l’artiste polonais qui s’en est allé cette année aussi. Il le méritait, il nous l’a offert.
6) Le renouveau des arts plastiques contemporain, ou en tout cas une preuve de son intérêt constant et novateur avec le projet de Trois expositions organisé au bâtiment de l’ex-epa à Vevey par le Collectif RATS (curateur principal : Adrien Chevalley) au mois d'avril. Plus d'une vingtaine d'artistes, des illustrations et des perspectives aussi diverses que puissantes, au final, c'est la profusion et le chaos (nerf de la pulsion créatrice ?) qui y étaient à l'honneur. Preuve que partout et aussi petit que soit son bastion, l'art ne meurt pas, au contraire, il dure, se modifie et naît partout.
7) Le souvenir d'un penseur que le versant autoritaire et potentiellement étatisant des réseaux sociaux virtuels ne cesse de projeter vers l'actualité, Michel Foucault, de la naissance duquel nous célébrons l'"octoquinème" anniversaire (1926). À l'heure où chaque opposant un tantinet critique à l'égard du pouvoir peut être fiché (aux USA c'est le cas, à quand un Patriot Act suisse ?), il est peut-être temps de relire Surveiller et Punir. Heureusement, oui, il y a les Indignés.
8) L'essai d'un colloque uniquement estudiantin sur le thème du cool. C'était à Lausanne (UNIL), c'était ouvert et gratuit. Les participants s'en sont payés une tranche, les organisateurs aussi. Preuve que l'académisme peut aussi offrir une soupape. Actes à paraître.
9) La sortie d'un album de jazz, celui du pianiste veveysan Marc Méan. Mettant à l'honneur l'expérimentation et la recherche en musique il s'agit, je l'avoue volontiers, du coup de coeur du chroniqueur.
10) L'espoir, par la remise du Prix Nobel de Littérature (alors que Bob Dylan, eh oui, était dans la course) au poète suédois Tomas Tranströmer, d'une orientation de la littérature ou de sa reconnaissance du moins longtemps mise au placard, du genre poétique. Rappel que la culture, c'est aussi l'amour de l'allégorie qu'on applique sur le réel.
Julien Gremaud, coordinateur de Think Tank
1) Franz Gertsch au Kunsthaus de Zürich
D'une beauté absolue, l’œuvre hyper-réaliste dépasse largement l'idée de témoigner d'une époque – celle de nos parents – révolue. Cette rétrospective ("Saisons") aura aussi permis à son émissaire de replacer la peinture à sa place: celle d'une pratique de haut vol. L'occasion aussi parler de l'âge vif d'une manière plus sincère qu'un Germinal Roaux copiant Hedi Slimane qui lui–même copiait Robert Mapplethorpe.
2) Le troisième album de Metronomy
Avouons–le: avec Metronomy, c'était pas super bien parti (2008). Arrivé sur la pointe des pieds au mois d'avril, THE ENGLISH RIVIERA s'est pourtant imposé comme un album archi–pop, paradisiaque et aux niveaux de lectures multiples, rappelant de fait le dernier effort des versaillais de Phoenix. Deux albums proto–concepts élaborés par des gens de bonne fréquentation plutôt que par des garçons-coiffeurs. De quoi exhumer une douce mélancolie période Beach Boys années 80.
3) L’œuvre remasterisées de The Smiths
Poursuivons dans la musique pop qui, si elle n'est pas des plus audacieuses depuis une décennie, sait vernir ses dignes vétérans. L'inextinguible Steven Morrissey, président du fans club des New York Dolls, directeur artistique d'un imaginaire homo-érotique qui plaît même aux plus hétéros des Mexicanos depuis bientôt trois décennies, apolitique mais assez cultivé pour faire chier l'Intelligentsia blanche et surtout catégorique sur une chose: offrez–lui, ainsi qu'à son illustre moitié créatrice Johnny Marr, tous les millions du monde pour reformer les Smiths, il n'en voudra pas. The Smiths n'avaient pas les meilleurs morceaux ni les meilleurs albums, seulement voilà, c'était le groupe parfait: rapide, précis et de bon goût. Surtout de bon goût. Ce coffret (sorti chez Rhino) pour ainsi (re)mettre dans le vent trois générations de followers.
4) L'affaire L'Elysée-Lacoste
Ah, l'argent et la culture. Cette triste affaire (une photographe virée du Prix Lacoste-Elysée pour cause de soutien pro-palestinien, un directeur le cul entre deux chaises) dans les moments décisifs 2011 comme exemple même de ce qu'il ne faut pas faire dans cette discipline: vouloir tout, trop vite, trop grand surtout. Sam Stourdzé, le nouveau directeur de l'Elysée – le musée de la photographie de Lausanne – s'est imposé comme un grand manitou: bon organisateur (Charlie Chaplin, ça sera grand), mais aussi restaurateur (la cafétéria à l'entrée, entre les livres et les courants d'air), éditeur (le magazine de "l'autre photographie", ELSE, comme il se plait à le présenter), belle gueule, grande gueule. A trop passer de temps à s'auto–congratuler, le successeur du digne William Ewing a oublié une chose: on ne rigole pas avec nos impôts.
5) Février, ou la fin des années 2000
Où il s’agit ici de dépasser les problèmes d’historiens: en février 2011 cessaient successivement leurs activités trois (influents) projets musicaux: The White Stripes, The Streets et LCD Soundsystem. Trois séparations pour autant de nouveaux horizons chez ces façonneurs du paysage musical des années 2000. Le retour du rock à guitares, (parfois) enregistré en analogique (The White Stripes); la fusion parfaite de ces mêmes guitares avec des machines électroniques qui commençaient à tirer la gueule à force de tourner en rond (LCD Soundsystem); et puis un rap enfin revenu à visage humain, avec un beau cockney en prime (The Streets). Quelques mois plus tard, les années 2000 ”sérieuses”, politiques et culturelles, basculaient dans une ère nouvelle: désormais, on s’assied des mois durant devant les bureaux de Wall Street, on renverse ses dictateurs nord-afs et la star absolue des années zéro-zéros (Ben Laden) est hors-jeu.
6) Deerhoof au Romandie de Lausanne
Récemment, j’eu l’audace de clamer qu’il n’y avait plus de grands groupes lives, avec un peu de mauvaise foi; venant comme un cri du coeur, la réponse d’un des derniers vrais disquaires de la ville de Lausanne était intéressante: « Swans, Deerhoof, Roy and The Devil’s Motorcycle, Nissenenmondai! ». Il avait tout juste: parmi ce champ expérimental, je retiens Deerhoof en concert au Romandie, une véritable stupéfaction, l’air béat et l’acouphène partagé par les 200 personnes ce soir–là. Mes excuses soit.
7) Electrelane et le festival Nox Orae
La réformation d’Electrelane en 2011 et son passage sur la Riviera en août, lors de la Nox Orae, valait son pesant d’or. Durant les années 2000, Electrelane a fait partie de ces groupes qu'on a craint par tant de talent mais qui fut pourtant injustement ignorés du grand public. Ici et là, on remarqua des larmes surgir de proches et d'autres dans un cadre parfait: une cohérence dans la programmation, des choix artistiques risqués, une attention minutieuse aux visuels, une sonorisation plus que satisfaisante, relayant complètement les – très – bonnes dispositions des groupes programmés. En 2011, le festival Nox Orae avait fait presque aussi bien que la Kilbi.
8) The Artist de Michel Hazanavicius
The Artist fait partie de ce genre de films discursifs sur le cinéma, bien sûr, nostalgique, forcément un peu, attendrissant par son scénario, et donc classique: le muet est ici un choix non pas artistique ou stylistique, voire faussement esthétisant, mais opérant. C’est quand les bruitages surgissent que ce mélo gentillet éclate et marque, pour répondre de la meilleure manière aux pédants: que faire de l’héritage monstrueux de la cinématographie, plus que centenaire, ce surtout en France? Jouer avec ses codes plus qu’avec la 3D, peut-être bien… Processus similaire observable en art contemporain et en photographie notamment.
9) Pippa Middleton
La célébrité au XXIème Siècle se joue désormais à pas grand chose: une chanson (Lana Del Rey), des lèvres (Lana Del Rey), un clash télévisuel (Mathilde Warnier) ou, dans le cas de la susnommée, une robe. Pas franchement d’audace: il fallait juste être là, suivre la soeur. L’occasion d’un énorme retentissement médiatique, de milles histoires entre le LOL et l’inintéressant. Celle aussi de se rassurer: finalement, il reste des anglaises agréables à l’oeil.
10) La viabilité de Think Tank
Sans plan de communication ni impératifs, notre petit blog a vécu une première année d’activité honorable, se trouvant même au coeur de la hype en juillet, lorsque Pierre Raboud publia son papier sur le groupe 1995, rebloggé un peu partout. Une expérience somme toute anachronique pour notre rédaction, se passant d’annonces pré-événementielles, de clips et de photographies tendances, choisissant de fait une approche pluridisciplinaire pas forcément vendeuse, associant à ses articles des illustrations ”commandées” pour l’occasion – ce qui compliqua bien souvent la tâche – expérimentant le format vidéo avec plus ou moins de réussite. Mieux: pour 2012, nous continuerons d’élargir notre propos, avec une nouvelle rubrique TT Books englobant la littérature et, en nouveauté, la critique de livres d’art, de magazines ou de fanzines, quelques nouvelles têtes, le programme de mixTTapes enfin mis en route ou encore une publication sur papier.
Contribution photographique
Frédéric Gabioud publie ses photographies sur son Tumblr Suck Shrimps. Il collabore régulièrement avec Think Tank, notamment lors du festival barcelonais Sonar. Ci–dessus y figurent quelques contributeurs rédactionnels et visuels de TT.