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22 mai 2013

Kilbi Chéri 2013

Illustration: Burn
Dans quelques jours, Kilbi commence. Une bonne partie du crew Think Tank prépare activement son kit de survie pour ne rien rater de ces trois jours intensifs. Une fois de plus sold out mais toujours aussi innovant et ouvert, le Kilbi 2013 s'annonce comme une grande cuvée avec une programmation de tout haut niveau. Immersion non-exhaustive dans cette dernière avec les formations qu'on attend le plus.  

Pierre: La programmation du Kilbi s'affirme à chaque fois comme un savant mélange. Cela commence évidemment par la revendication d'un certain héritage rock de cette campagne fribourgeoise. On retrouvera néanmoins relativement peu d'historiques cette année. Peu mais pas n'importe lesquels: My Bloody Valentine, une des références indépassables du genre. Pas besoin de citer ici des noms de chanson ou d'album, c'est clair que cela va faire beaucoup de bruit. On aura également le plaisir de voir se promener une autre figure mythique du monde indé avec Jim Jarmush, ici en collaboration musicale avec Josef Van Wissen. Plus récent mais déjà glorieux, les Liars seront également là. Plutôt que de parler des autres têtes d'affiches, comme, Flaming Leaps Thee Oh Sees ou Grizzly Bear, relevons le choix judicieux de groupes plus récents qui promettent beaucoup en live: le punk potache de Fucked Up, la M.I.A. blanche de Skip&Die, la cold wave de Trust et surtout la violence de Death Grips. Ces derniers constituent sûrement le groupe le plus attendu de cette édition, tant on est impatient de recevoir en chair et en os (bifle?) leur musique entre hip-hop et électro-punk.


Julien: Il est vrai qu'outre les groupes et projets rassembleurs que tu viens de citer, ce sont les seconds couteaux qui font de ce festival l'un des plus cohérents du paysage musical connu et assurent trois soirs de très haute tenue artistique – pour autant que l'on se permette ici de hiérarchiser. Si l'hystérie collective des quatre dernières années s'est un peu calmée, c'est bien pour laisser place à un certain monopole de de la "pensée" Kilbi (tout est bon, tout y est parfait), une unanimité autour d'une affiche à chérir comme un ordre divin et, avant tout, un irréductible besoin d'y vivre trois jours durant, peu importe le temps. Véritable point de repère culturel – et identitaire – l'entité singinoise semble refuser la lutte des noms pour tracer son sillon dans un univers où les termes "indépendants" ou "mainstream" n'ont finalement que peu leur place. Ainsi, si Pantha du Prince, My Bloody Valentine ou Grizzly Bear sont à bien des égards la carte sécurité du festival, aucun de ces noms "accessibles" ne vient salir cette affiche – fait suffisamment rare pour le relever. Personnellement, je te suivrai du côté de Death Grips et de Trust, en n'oubliant ni les excellents Tinariwen, au succès tardif amplement mérité, ni Minimetal ou d'autres formations moins connues sévissant en première partie de journée. Tard le soir, c'est un autre univers du Kilbi qui s'ouvre à nous…


Pierre : Côté électro en effet, on est également très bien servi avec des pointures au rendez-vous. Peu de formations tournées vers le club, mais des entertainers géniaux comme Dan Deacon, peu de temps après son très bon AMERICA, toujours aussi fort en bidouillage. Les nappes et cliquetis de Pantha du Prince cotoieront les vagues plus pop et dansantes de Gold Panda. Surtout, l'expérimentation techno sera à l'honneur avec Peter Swanson, la musique club poussée au clombe du détournement bruitiste. Et celui qui a sorti un des meilleurs albums de 2012 après des précédents opus déjà très réussis sera là: Andy Stott, l'autre grosse attente de cette édition. On est juste impatient de découvrir en livre la musique hachée d'intelligence de LUXURY PROBLEMS. A noter que ces deux derniers concerts auront lieu dans la toute petite maison. Pas sur pour autant que cela sera intimiste, mais certain que l'osmose adviendra. Rajouter encore un peu de folk (Kurt Vile, Jandek, Connan Mockasin), de la musique non-occidentale (Tinariwen), les héros locaux (Dj Fett, Dj Marcelle), mélangez le tout et vous obtenez programmation pas loin du rêve.


Julien: Oui, impossible de passer à côté d'Andy Stott ces 12 derniers mois. Espérons qu'il ait parfait son approche live de son dernier LP, sa prestation cet hiver au Berghain ayant laissé le public de marbre (beat accéléré, LP mixé, son pas du tout à la hauteur). Le Club Stage devrait lui convenir davantage que l'ancienne usine électrique berlinoise. Si l'on risque de laisser nos dernières forces lors de la prestation du Mancunien, les autres DJ sets ne sont pas à oublier le samedi, entre Julian Sartorius et le "résident" DJ Fett. Sinon, c'est toujours avec pas mal de curiosité qu'on attaquera cette nouvelle édition du festival fribourgeois à la configuration optimale pour ne rien rater et vivre l'expérience au plus proche. Afin, peut-être, comme le disait Hans Ulrich Obrist dans une récent interview à Libération, de « réintégrer des rituels dans la société, à une époque où il y en a moins ». A noter pour terminer que l’Office fédéral de la culture a lancé un projet de promotion de la critique musicale destiné à de jeunes journalistes, mini-workshop qui se tiendra durant les trois jours du festival. N'hésitez pas à aller jeter un coup d'oeil au projet Where The Hell Is The Press? sur Internet.